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Chapitre 2 Interprétation du rêve de Nathalie


Qui sont ces autres personnages des rêves ? Objets externes ou objets internes ? De la réponse à cette question dépend la nature de l’interprétation proposée : interprétation objective ou subjective ?

Le terme d’objet est essentiel en psychanalyse, indissociable de la notion de pulsion. En effet, une pulsion se définit notamment par son objet. « L’objet de la pulsion est ce en quoi ou par quoi la pulsion peut atteindre son but »(1). L’objet est donc une personne extérieure ou une chose par laquelle la pulsion pourra se décharger. Par exemple, la faim d’un bébé trouvera le sein pour s’exprimer. À l’origine de la pulsion existe donc dans le psychisme du sujet un objet interne, dans notre exemple une représentation du sein qui pourrait combler la faim, qui est projeté sur une représentation externe, la vision du sein présenté par la mère.

Aussi, dès lors que l’on considère que les rêves sont le lieu d’expression des pulsions, il faut déterminer si tel élément onirique correspond à un objet interne, une représentation de ce qui permettrait à la pulsion d’atteindre son but, ou bien à un objet externe, c’est à dire une image de la personne ou de la chose vers laquelle la pulsion sera finalement dirigée.
Dans le rêve partagé précédemment, la rêveuse a imaginé la mort de son ex-compagnon. Opter pour une interprétation objective, c’est considérer que l’image correspond à un objet externe. Dans ce cas, le désir exprimé est celui de la mort réelle de cet ex-copain. Le rêve pourrait alors s’expliquer par le désir de mettre définitivement fin à cette relation, d’éviter à la rêveuse les tourments de cette rupture dont elle ne parvient pas à faire le deuil. À l’inverse, une interprétation subjective se base uniquement sur le sujet, l’auteur du rêve. La mort devient ainsi une image de la perte ressentie intérieurement et projetée sur le personnage de l’ex. Le caractère définitif de cette séparation est exprimé par la mort physique. Le rêve exprimerait alors plutôt une angoisse liée à la perte, au manque, à la castration.

Impossible de ne pas s’arrêter un instant sur ce terme de castration pour éviter toute incompréhension. Le complexe de castration freudien, qui a pour but d’expliquer le développement psychique de l’enfant, a été imagé par l’amputation des organes génitaux, menace générant une angoisse pour le petit garçon et le sentiment que cette ablation a déjà eu lieu pour la petite fille. Mais on peut comprendre autrement la notion de perte que renferme ce complexe de castration, notamment avec Serge Tisseron : « Il existe bien, chez les enfants, une angoisse et une amertume, mais celle-ci ne peut se laisser réduire à l’angoisse qu’on la lui coupe chez le garçon et qu’on la lui ait déjà coupée chez la fille ! Pour les deux sexes, la difficulté principale est de devoir se contenter du sexe qu’on a sans jamais pouvoir jouir de l’autre, sauf à travers le sien propre au moment des relations sexuelles. L’être humain est homme ou femme et il ne peut jamais être l’un et l’autre. Autrement dit, l’angoisse de castration rapportée au sexe consiste dans le fait d’être enfermé dans une identité sexuelle arrêtée et définie. »(2)

Ainsi, dans le rêve, on peut supposer qu’un tel sentiment de perte, d’incomplétude, de manque, s’est aggloméré à l’objet interne correspondant, au complexe de castration. Ce ressenti, pour s’évacuer, se décharger, a cherché un objet externe adéquat dans la vie du sujet, l’image de l’ex-copain se présentant alors naturellement, lui-même étant à l’origine du malaise vécu. Alors, partant de cette perception du rêve, l’imaginaire associe les symboles, avec une capacité de création qui révèle quelque chose de transcendant en chacun de nous, de divin si l’on préfère, le pouvoir unique de nous révéler entièrement en quelques images encore jamais vues dans l’Histoire, de nous inscrire par nos rêves dans une évolution propre à l’Homme, seul être capable de chercher un sens dans toute cette magie nocturne.

Au final, les deux modes d’interprétation se mêlent. La réalité extérieure, la rupture amoureuse récente, a certainement réactivé un sentiment intérieur plus profond, plus ancien, un sentiment de castration, une angoisse d’abandon ou même d’anéantissement, de mort. On comprend ainsi la difficulté à vivre cette séparation en raison des mouvements psychiques qui s’ensuivent. Une image d’iceberg apparaît ici pour moi, toute cette masse gelée qui impose le mouvement, la partie visible ne faisant que dériver au gré de courants souterrains.

1. S. Freud, Treibe und Triebschicksale, 1915.
2. S. Tisseron, Vérités et mensonges de nos émotions, Paris, Le Livre de Poche, 2005, p. 78.

EN CONCLUSION :

Chapitre 2 du livre à la source des rêves, s’appuyant sur l’exemple d’un rêve pour introduire les notions de pulsion et de castration.




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